On vous en parlait le mois dernier, Cocoon est de retour après 4 ans d’absence et quelques projets perso. Le groupe, initialement formé par Mark Daumail, l’auteur-compositeur et la chanteuse Morgane Imbeaud, avait su avec classe éduquer une génération entière au folk en France. Ils s’étaient séparés après leur dernière tournée en 2012 et deux albums remplis de tubes comme Chupee ou On My Way qu’on ne se lasse pas d’écouter encore et qu’on gardera en tête pour longtemps.
Pour ce nouvel opus, Welcome Home, qui sortira officiellement le 26 aout prochain, Mark revient tout seul ou presque pour un album qui nous transporte dans son univers folk et personnel. Un album gorgé de soleil, qu’on écouterait bien en acoustique avec seulement une guitare autour d’un bon feu sur une plage ou dans un de ces paysages désertiques des États-Unis. Cette fois-ci, Mark a fait appel à la voix gospel de Nathalie Prass et au génie de l’Americana Mattew E. White, pour obtenir le son folk et chaleureux tant désiré.
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Nous avons eu la chance de pouvoir rencontrer Mark Daumail de Cocoon pour qu’il nous raconte un peu l’histoire de ce « Welcome Home ».
Modernists : Salut Mark, tout d’abord une question un peu inévitable, pourquoi Morgane Imbeaud ne t’accompagne pas sur cet album ?
Mark : « Pour tout avouer, quand on a terminé notre dernière tournée en 2012 pour l’album, « Where The Oceans End », on était vraiment épuisés. Il y a des groupes qui tiennent surement mieux que nous, mais cela faisait quand même 7 ans que nous vivions 7 jours sur 7 et 24h sur 24 ensemble sans être un couple. Même si l’on s’aimait et qu’on avait un véritable respect mutuel, la fatigue physique et surtout psychologique arrivait à son paroxysme.
De mon côté, j’en avais marre du son de Cocoon, j’avais envie de faire quelque chose de différent, de plus électro. À l’époque, il y avait un gros retour du synthé avec James Blake par exemple, que j’écoutais beaucoup et qui m’a donné des envies dans cet univers. Pour Morgane, c’était surtout de la fatigue physique et une envie d’entreprendre ses propres projets.
On est en très bons termes avec Morgan, elle viendra surement chanter avec moi sur scène pour la tournée qui débutera cet automne. »
Modernists : Pourquoi alors sortir ce nouvel album sous le nom de Cocoon ?
Mark : « Après m’être lancé en solo avec mon album, « Speed Of Light », aux sons plus électro qui commençait doucement et gentiment à faire sa place, mon bébé est né avec des problèmes cardiaques. Mon univers s’est complètement effondré, on était, avec ma femme, continuellement à l’hôpital à Bordeaux et c’était vraiment comme le film La Guerre est Déclarée de Valérie Donzelli et Jérémie Elkaïm. Les grand couloirs froids, les blouses blanches et l’attente de savoir si mon fils allait avoir besoin d’une opération ou pas. Pour changer un peu des bruits des machines respiratoires, j’ai demandé si je pouvais apporter ma guitare pour essayer de faire du bien au bébé mais également à nous en égayant un peu l’ambiance triste de l’hôpital.
Au fur et à mesure, sans forcément m’en rendre compte, j’ai vu que j’avais 6 chansons. Au bout de 6 mois, mon fils a été guéri sans opération et en rentrant tous à la maison, j’avais ce début d’album qui se profilait. J’ai commencé par le jouer à mes proches perso et pro et ils m’ont tous dit la même chose, que j’étais dans la merde car les chansons étaient vraiment du Cocoon. J’ai rapidement appelé Morgane pour lui dire que je de relançais la machine. Ça tombait très mal pour elle car elle s’apprêtait à sortir trois projets en solo. Elle trouvait aussi que l’album était vraiment trop personnel pour y ajouter son nom. Je ne voulais en aucun cas la remplacer car elle a vraiment une voix belle et singulière, je me suis dit que j’allais développer Cocoon sous la forme d’un collectif de talents. Il faut dire que notre public n’apporte pas forcément beaucoup d’importance à Mark et Morgane mais plutôt à Cocoon, à son style et son esthétique.
J’avais déjà mon nom pour mes projets électro et Cocoon pour mes projets folk donc je me voyais pas créer un troisième nom pour un album qui ressemblait au style de Cocoon. »
Modernists : Comment as-tu fait pour enregistrer Welcome Home ?
Mark : « J’ai d’abord commencé par composer à Bordeaux, dans mon studio, pour les guitares et les basses. J’ai ensuite eu l’idée de rajouter des voix Gospels, qui, selon moi, sonnait bien avec l’histoire de l’album en apportant un sentiment d’espoir et de foi. Pendant les longs mois à l’hôpital, j’écoutais beaucoup l’album de Nathalie Prass qui a une voix incroyable. J’ai vu que c’était Mattew E. White qui avait réalisé son album donc je leur ai envoyé mes démos en Virginie, à Richmond et ils ont tout de suite accroché et accepté de le faire avec moi.
J’ai enregistré ma voix à Berlin avec Martin Gallop qui a travaillé avec des grosses stars comme Adèle ou Katy Perry. Je pense que c’est très important quand tu chantes en anglais, qui n’est pas ma langue maternelle, d’enregistrer et de corriger les textes avec un anglophone. Il y a des groupes français qui enregistrent en anglais avec des francophones et je trouve que ça s’entend trop. J’ai beau savoir écrire en anglais, c’est compliqué d’avoir le bon accent et la bonne prononciation.
À Berlin, j’ai enregistré dans un studio de l’ancienne radio de la RDA, c’était complètement fou et intense comme expérience. Chaque fois que je rentrais le soir, j’avais l’impression d’avoir fait 8h de gym. Normalement, les voix, tu les enregistres en 2 ou 3 jours mais là, ça a été 12 jours à temps plein sur un micro que Martin avait choisi pour moi. On a mis une journée à le trouver mais ça valait vraiment le coup car c’est un vieux Neumann qui apporte un son tellement particulier : la Rolls des micros !
Ensuite, je suis allé en Virginie rejoindre Mattew et Nathalie pour ajouter les voix gospels, les cordes, les cuivres et la touche Americana en rajoutant un Pedal Steel. Un mec qui chantait avec Bon Iver est passé par hasard dans le studio et on a rajouté sa voix. C’était vraiment dingue comme ambiance, pendant tout ce temps-là, je n’ai presque rien fait, je me suis un peu laissé porter et c’est dans ces moments-là que tu vois qu’en terme de folk, la France est vraiment en retard par rapport aux Etats-Unis. Sans eux je n’aurais pas pu optimiser au maximum mon envie. »
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Modernists : Ça ne te fait pas bizarre de monter un album comme ça, tu n’as pas la sensation qu’il t’échappe un peu ?
Mark : « Non pas du tout, de toute façon j’ai toujours fait comme ça. Pour les premiers albums de Cocoon, on enregistrait entre Londres et Paris. J’ai toujours eu envie d’apporter de l’authenticité et de m’accorder du temps pour trouver les bons sons. Si je veux ajouter une flûte de pan sur une chanson, je préfère partir au fin fond du Pérou pour trouver un véritable joueur de flûte de pan et l’enregistrer plutôt d’ajouter des sons réalisés sur ordinateur.
Pour Welcome Home, je devais trouver de véritables voix du Gospel, il fallait donc que j’aille à la source et Mattew E. White est le meilleur dans ce domaine. Il est peu connu en France, mais en Angleterre ou aux Etats-Unis il fait salle comble. »
Modernists : Est ce que les villes, dans lesquelles tu travailles t’inspirent ou font changer certaines choses sur l’album ?
Mark : « Je ne suis pas parti dans ces villes pour qu’elles m’inspirent dans quoique ce soit, c’est surtout des talents que je voulais rejoindre. Pour les premiers albums, notre producteur vivait à Londres et comme nous avions vraiment envie de travailler avec lui, on faisait des allez retours Paris-Londres. Pour « Welcome Home », c’est vraiment le même schéma, je suis allé dans les villes où trouver les talents avec qui je voulais collaborer. »
Modernists : Pourquoi Welcome Home comme nom ?
Mark : « Il y a plusieurs raisons, tout d’abord, c’était une manière pour moi de dire bienvenue à mon fils après 6 mois de galères à l’hôpital. À la manière des soldats qui revenaient abimés du Vietnam dans leur famille, il y avait toujours une banderole « Welcome Home » accrochée sur la devanture de leur maison. C’était un peu pareil pour nous, on rentrait écorchés de l’hôpital. Welcome Home, c’est aussi universel, tout le monde connait cette signification. »
Modernists : Tu as fait appel à une peintre pour imaginer la pochette de ton album, tu nous racontes cette collaboration ?
Mark : « Au delà de la pochette, je voulais que tous les titres soient représentés par un bâtiment, par une maison. J’ai donc trouvé une peintre qui peint beaucoup de maisons en Californie : Esther Pearl Watson. Elle a adoré le concept et pendant 8 semaines, elle nous a envoyé beaucoup de peintures pour au final en sélectionner 12. J’adore ce qu’elle a fait, c’est vraiment très beau et ça correspond parfaitement a ce que j’imaginais pour Welcome Home. Je voulais aussi que les maisons aient une signification face aux chansons, par exemple, la caravane que l’on retrouve sur Shooting Star fait référence à la célébrité, à cette vie qu’on mène partout, qui est éphémère et qui ne tient qu’à un fil. »
Modernists : On a vu également qu’en ce moment tu faisais des classrooms sur Facebook et Périscope, c’est quoi ce projet ?
Mark : C’est un projet assez drôle qu’on a décidé de faire pour rendre hommage à nos fans de la première heure. Quand tu vas sur Youtube et que tu tapes Cocoon, tu as plein de gens qui ont fait des covers de nos chansons, dont un avec une cornemuse sur la plage du Cap d’Agde… Je voulais leur présenter de façon un peu plus fun les nouvelles chansons de l’album en les dévoilant avec des cours de guitare sur Périscope.
Merci Mark !
L’album de Cocoon sort le 26 aout 2016, vous pouvez le retrouver pour un concert à Bruxelles en août et pour le début d’une tournée dès octobre.